Anthony a 23 ans, et les larmes aux yeux lorsqu'il raconte sa folle épopée. C'est un projet qui lui tenait à cœur depuis des semaines, et le voilà aujourd'hui réalisé. Des billets plein la sacoche, il déambule goguenard. Nous l'avons rencontré à l'Aéroport International Bastia-Poretta, une heure avant son embarquement pour Marseille, d'où il prendra un vol en première classe pour Barcelone où il restera quinze jours, dans le plus bel hôtel de la ville. Là-bas, son calendrier est bien chargé. Il a prévu de visiter tous les établissements de nuit les plus huppés, ainsi que les meilleurs restaurants et bars à tapas. Sans oublier, bien sûr, comme tout Corse qui se respecte, une tournée minutieuse des bars à hôtesses, que l'on appelle affectueusement "caboulots". Tout ça, il le doit à la fabuleuse mobilisation entamée sur les réseaux sociaux, qui a prodigué un succès considérable à sa collecte de fonds. "J'ai décidé de collecter des fonds via internet car je pense que c'est un bon moyen de se faire de l'argent. J'ai des amis qui ont monté leur boîte comme ça, d'autres qui ont pu s'acheter des T-Max, des ordinateurs. C'est plus facile que de travailler, et c'est moins risqué que de voler ou de vendre des armes. Moi, j'avais envie d'aller au caboulot à Barcelone, alors j'ai dit, pourquoi pas ? J'ai même pu m'acheter une toc de veste Stone Island pour pas être trop à la risa au Riviera."
Plus de deux mois sans rapports sexuels
Derrière cette insatiable volonté d'aller au caboulot, il existe une véritable démarche d'introspection personnelle. En effet Anthony confie avoir connu une déception amoureuse au mois de mars et depuis, c'est la descente aux enfers. "Deux mois sans rapports. Comprenez ma détresse. Beaucoup de gens l'ont comprise, en tout cas. En témoignent les liasses que je me trimballe. Je ne sais pas comment les remercier. En contrepartie de leur investissement, je leur propose des sextape de toutes les prostituées que je fréquenterai à Barcelone. En HD, hein!"
Anthony n'est donc pas un ingrat. Et il sait qu'il aura de nouveau recours à ce moyen de financement si besoin. Du côté des donateurs, on est fier d'avoir participé à cette superbe histoire. Gaston, 64 ans, témoigne avec son sympathique accent provençal: "Moi je suis Corse de souche, depuis plus de 10 ans. Et la solidarité c'est comme l'omerta et le Ricard, ça fait partie de nos valeurs. Alors quand j'ai vu ce jeune en difficulté, j'ai pas hésité, je lui ai fait un don de 300€. J'attends avec impatience sa contrepartie, car moi aussi, dans ma vie conjugale, j'ai connu des jours meilleurs".
Il va sans dire que les valeurs ancestrales de cette île sont plus vivaces que jamais, et qu'avec une telle solidarité, le peuple Corse a encore de beaux jours devant lui. La rédaction de Carsico s'est, elle aussi bien évidemment associée au fabuleux projet d'Anthony, en lui versant 1000€. Car oui, il existe encore des gens généreux dans ce bas monde.
Pour Carsico, Jean Bougne.